Dehors.
Mais je n’y suis pas.
Je ne parviens pas à écrire sur le sujet. Dehors.
J’ai essayé.
J’ai essayé un, deux, trois poèmes. J’ai essayé la nouvelle. J’ai essayé la fiction. L’autofiction. L’autobiographie. J’ai essayé.
Rien.
Tout tombe à plat. Jeux de mots, rythmes, jeux sonores.
Non.
Je ne chante pas.
Un geste vain. Il ne ferait que s’ajouter au flux incessant de mots, d’images.
Je me sens saturée. Le monde a forcé la porte de chez moi. Il s’est imposé à ma table, dans mon lit, de jour comme de nuit. Pleine à ras bord d’incantations, de recommandations, d’injonctions, de sollicitations, de prévisions.
Je veux bien vivre avec l’épidémie. Mais pas avec tout le fatras des informations, des réseaux sociaux, des prises de parole. Du bruit. De l’agitation.
Du vent.
Alors même qu’enfin le silence et la lenteur s’invitent dans nos vies.
J’ai posé trois plantes devant mon écran de télévision. J’ai débranché la radio. J’ai jeté les rideaux de la porte-fenêtre avec vue sur l’immense platane. Et le ciel. J’ai mis mon réveil cette nuit à 5 heures du matin pour regarder la pluie d’étoiles. J’ai noté l’arrivée des martinets il y a quelques jours. J’ai semé des radis, de la roquette, des fleurs des champs sur mon balcon de deux mètres carrés.
J’ai dégagé le monde de ma table. De mon intérieur.
Je suis revenue à moi.
Alors non. Je ne parviens pas à écrire.
Je veux juste rêver. Contempler.
Faire corps avec le dehors.
Me sentir dans le vivant.
24 avril 2020